Durant les bombardements de l’OTAN en 1999, l’Armée de libération du Kosovo aurait torturé et exécuté des Serbes, des Roms et des collaborateurs albanais
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Carte du Kosovo et du nord de l’Albanie
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Durant les bombardements de l’OTAN, au printemps 1999, et dans les mois qui suivirent, l’Armée de libération du Kosovo (UÇK) géra un véritable archipel de centres de détention, dans lesquels furent torturés et assassinés des Serbes, des Roms mais aussi nombre d’Albanais accusés de «collaboration» avec le régime serbe.
Prisons secrètes
Ces prisons secrètes étaient souvent accolées à des camps d’entraînement de la guérilla, nombreux dans le nord de l’Albanie. Le principal camp se trouvait dans les bâtiments abandonnés de la zone industrielle de la petite ville de Kukës, qui vit également passer plus de 150 000 réfugiés albanais chassés du Kosovo durant le conflit.
Dans ces centres de détention, la torture était systématique. «J’ai vu des gens battus, poignardés. Certains étaient privés de nourriture durant cinq à six jours. J’ai aussi vu des personnes tuées.» L’homme qui raconte cette histoire affirme que la majorité des captifs étaient des civils, surtout des Albanais accusés de travailler pour le compte du régime serbe, de même que quelques Roms. Ce survivant, un Albanais, qui avait été accusé de «collaboration», a donné son témoignage aux journalistes de la BBC et de BalkanInsight, une publication anglophone spécialisée sur les Balkans.
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Les journalistes du BalkanInsight ont également eu accès à certains rapports, jusqu’à présent restés secrets, de l’OTAN qui attestent que des soldats de l’Alliance atlantique sont intervenus dans certains camps pour libérer des prisonniers. Cela signifie que l’OTAN et très certainement les autres institutions internationales présentes au Kosovo à partir de juin 1999, étaient au courant de l’existence de ces camps. Le camp de Baballoq, près de Decani, dans l’ouest du Kosovo, aurait continué d’accueillir des détenus à l’été 1999, alors que les troupes internationales s’étaient déjà déployées dans l’ancienne province serbe.
Tortionnaires pas inquiétés
Il y a un an, l’ancienne procureure générale du Tribunal pénal international, Carla Del Ponte, écrivait dans ses mémoires que la Mission des Nations unies au Kosovo et son chef de l’époque, Bernard Kouchner, avaient refusé de lui prêter toute aide pour poursuivre ses investigations sur le sort d’au moins 300 civils serbes du Kosovo portés disparus et probablement déportés en Albanie. Selon la Suissesse, ces civils auraient pu alimenter un trafic d’organes dirigé par les anciens rebelles de l’UÇK.
L’enquête du BalkanInsight n’évoque pas ce trafic d’organes, mais confirme l’existence d’un centre de détention à proximité de Burrel, une autre petite ville du nord de l’Albanie, centre présumé du trafic.
L’enquête établit également que certains anciens tortionnaires occupent aujourd’hui des positions importantes dans les institutions, notamment judiciaires, du Kosovo. Aucun n’a jamais été inquiété.
Les résultats de l’enquête ont été démentis en bloc par le premier ministre du Kosovo, Hashim Thaçi, chef politique de l’UÇK à l’époque des faits. En revanche, la nouvelle mission européenne au Kosovo Eulex, qui est notamment chargée de juger les crimes de guerre, confirme disposer de documents sur ces camps.
Le Comité de défense des droits de la personne de Pristina, toujours resté très discret jusqu’à présent sur les exactions commises par l’UÇK, appelle aussi pour la première fois le gouvernement kosovar à cesser d’ignorer ces lourdes accusations. La ministre kosovar de la Justice, Nekibe Kelmendi, qui avait vivement dénoncé il y a un an les allégations de Carla Del Ponte, estime qu’il revient exclusivement à Eulex d’enquêter sur ces nouvelles accusations.